Lexique Médico-Juridique

 Le Livre d'Or
 

 
 
 

Les conflits collectifs


  1. La grève


La grève est une cessation concertée, collective (sauf s’il existe un seul salarié dans l’entreprise) et totale du travail dans le but d’appuyer une revendication professionnelle. Reconnu par la constitution, le droit de grève s’exerce dans le cadre des lois qui le règlementent (constitution du 4 octobre 1958).


    1. L’exercice du droit de grève et le contrat de travail.

Pendant longtemps on considérait que le gréviste rompait son contrat de travail en cessant le travail, et que l’employeur n’était pas obligé de réintégrer le salarié. La loi du 11 février 1950 a décidé que la grève ne rompt plus le contrat de travail sauf faute lourde imputable au salarié.

      1. Le principe : absence de rupture mais suspension du contrat de travail.


La grève ne rompt pas le contrat, à la fin de la grève le contrat reprend ; par conséquent, le refus de l’employeur de reprendre le salarié à la fin de la grève est une clause injustifiée.


Il n’est pas possible de remplacer un gréviste par un intérimaire ou un salarié ayant un contrat à durée déterminée. Le gréviste ne doit pas non plus aller travailler ailleurs.


Le défaut de reprise du salarié par l’employeur à la fin de la grève est présumée abusive, et la sanction normale de ce fait serait la nullité du licenciement et donc la réintégration du salarié.


Le salarié gréviste conserve les avantages sociaux dont il a droit.


La grève ne fait que suspendre le contrat de travail. C’est la position du droit positif et de la jurisprudence. La grève entraine la suspension du lien de subordination ; ce qui implique que si le gréviste est accidenté sur le trajet du travail, il ne sera pas considéré comme un accident du travail ; de même l’employeur ne peut se baser sur le règlement intérieur pour appliquer des sanctions.


En ce qui concerne la récupération des heures de grève, l’employeur ne peut l’imposer ; c’est seulement par accord que cela peut se faire.


      1. Le tempérament


C’est la faute lourde du salarié qui rompt le contrat de travail. Il faut qu’il s’agisse d’une faute d’une particulière gravité qui révèle l’intention de nuire de la part du gréviste.


Le problème se pose en pratique par ce qu’on appelle la séquestration de dirigeants ou de cadres. Il faut une faute imputable au salarié. Pour la grève politique, la seule participation est caractéristique de faute lourde. Toutefois, la jurisprudence admet l’existence d’une faute collective au cas où les conventions collectives n’ont pas été respectées. On parle souvent de la théorie des meneurs pour retenir la responsabilité de certaines personnes dans les grèves illicites.


Les atteintes à la liberté qui peuvent se produire à l’occasion d’une grève sont pénalement sanctionnées.


La jurisprudence interprète restrictivement cette notion d’atteinte.


C’est à l’employeur de prouver la faute lourde. La faute lourde n’entraine pas automatiquement la rupture du contrat ; elle constitue une simple occasion pour l’employeur de rompre le contrat.


    1. Le droit de grève et la responsabilité civile.


Est-ce que le droit de grève s’accommode du jeu de l’article 1382 et suivants du Code Civil ?


      1. La responsabilité des syndicats


Plusieurs actions patronales en justice dont toutes émanent de la Régie Renault ont essayé de mettre en jeu la responsabilité syndicale à la suite de grèves ayant causé des dommages.


La jurisprudence indique que la grève est un droit pour les salariés même si son exercice est collectif. Il en résulte que les fautes qu’ils peuvent commettre à l’occasion d’une grève ne sont pas celles des syndicats mais des salariés même si l’exercice est collectif.


La responsabilité civile du syndicat ne peut en principe être engagée à l’occasion de l’exercice du droit de grève. Toutefois, la Cour de Cassation a réservé le cas où le syndicat a une part personnelle dans les agissements fautifs.


      1. La responsabilité des salariés grévistes et en particulier des délégués.


Les données du problème de leur responsabilité sont en gros les mêmes que celles des syndicats mais avec quelques différences.


On peut se placer sans difficulté sur le terrain de la faute, ce qui n’était pas facile, chez les syndicats. Le problème le plus important est celui de la responsabilité des délégués grévistes. Cette responsabilité se situe sur le terrain de la faute lourde. Pour que la responsabilité des délégués soit mise en cause, la faute qui leur est reprochée doit être personnelle et présenter une gravité particulière ; un lien de causalité doit exister entre cette faute et le dommage. Les conditions posées font qu’il n’est pas simple de mettre en cause la responsabilité des délégués. Il faut même tenir compte aussi de la faute éventuelle de la victime, l’employeur.


En gros, la jurisprudence ne sanctionne que les fautes graves intellectuellement détachables du droit de grève.


    1. L’exercice du droit de grève et les tiers.

      1. Les non grévistes.

Ils sont protégés éventuellement par les sanctions des atteintes à la liberté du travail. L’employeur se trouve obligé d’exécuter ses obligations normales à leur égard : payer leur salaire. L’employeur n’est pas dispensé de cette obligation que lorsque la grève présente pour lui les caractéristiques de la force majeure. Très souvent, en pratique, ces conditions se trouvent réunies lorsque la grève s’accompagne d’une occupation des locaux et que les autorités publiques se refusent de les faire évacuer. Mais il ne faut pas alors que la grève ait pour cause une faute de l’employeur.

      1. Les tiers

Si un dommage est causé à des tiers par des salariés grévistes, la responsabilité de l’employeur en tant que commettant ne peut pas jouer, le lien de préposition étant suspendu par la grève.

En ce qui concerne la responsabilité de l’employeur à l’égard des usagers, en principe, l’employeur reste tenu de ses obligations contractuelles. La grève par elle-même n’est pas un cas de force majeure mais peut en présenter les caractéristiques.

La jurisprudence est assez stricte dans l’appréciation de la responsabilité à l’égard des tiers. Elle vérifie le caractère imprévisible et irrésistible de la grève.


  1. Le lock-out.

    1. La notion de lock-out et sa nature

Très souvent ce qu’on appelle lock-out, c’est la fermeture provisoire d’une entreprise ou d’un établissement au cours d’un conflit collectif. Ce refus de l’employeur de laisser l’accès aux locaux peut avoir des motivations diverses. Ce peut être la volonté de briser une grève, prévenir une grève ou sanctionner une grève.

On a souvent tendance à considérer que le lock-out est la symétrie de la grève.

Une première différence est que le lock-out n’a pas un côté collectif du côté de son auteur ; c’est le fait d’une seule personne, l’employeur. Au contraire, le lock-out est collectif du côté de ceux qui le subissent.

Une autre différence existe également c’est que le lock-out n’est pas sélectif.

La grève constitue un droit mais il n’en est pas ainsi du lock-out. Aucun texte ne le régit. Il n’y a donc pas de réciprocité sur laquelle pourrait se baser l’employeur. Et la Cour de Cassation, à plusieurs occasions, a rappelé que le lock-out n’était pas un droit, ce notamment dans un arrêt du 10 janvier 1973 «Conflits des O.S. de l’Usine Renault».

    1. Régime juridique du lock-out

      1. Le principe

La jurisprudence exclut l’idée d’un droit du lock-out et traite au départ le lock-out comme une faute contractuelle de l’employeur à l’égard des salariés et par conséquent l’employeur reste tenu des salaires pour les salariés non grévistes.

La jurisprudence parait limiter ce principe au cas de fermeture temporaire à titre d’intimidation, de pression. Comme moyen de pression le lock-out est considéré comme illicite ; de même il est illicite lorsqu’il est utilisé comme sanction.

      1. Les tempéraments.

La fermeture de l’entreprise ou d’un service est justifiée lorsque la grève d’un secteur ou de certaines catégories crée une situation contraignante rendant impossible la poursuite d’une activité normale (Cass. Soc du 31 octobre 1989).

La situation contraignante peut découler de la forme d’action adoptée par les grévistes (ex : occupation illicite des locaux).


  1. Les modes de solutions des conflits.

Pour résoudre un conflit collectif de travail, la loi prévoit plusieurs procédures facultatives et réglementaires procédure de conciliation, procédure de médiation, procédure d’arbitrage.

Qu’est ce que le conflit collectif ? Il y a 2 éléments de réponse à cette question.

Premier élément : l’objet du conflit collectif.

Il faut que soit en cause des droits ou des intérêts communs à des travailleurs. Mais on peut observer qu’une décision individuelle d’un employeur concernant un salarié peut déboucher sur un conflit collectif.

Deuxième éléments : les parties.

Il faut qu’un groupe de travailleurs soient en cause et posent une revendication.

Il y a une distinction qui est faite entre un conflit juridique et un conflit non juridique.

Le conflit juridique porte sur l’application du droit, de son interprétation, tandis que les conflits non juridiques ont pour objet la modification du droit existant.

Quelles procédures appliquer à ces conflits pour leur solution ?

Si ces procédures aboutissent, il faut pouvoir mettre en place des sanctions, à ce niveau, il y a des réticences tant du côté des employeurs que du côté des salariés.

Du point de vue théorique, jusqu’en 1930, on s’est trouvé dans une phase de tentative de trouver des procédures.

C’est en effet par une loi de 1936 qu’on a introduit en France des procédures de règlement. Il s’agit de la conciliation et de l’arbitrage obligatoire.

Ces procédures ont été suspendues avec l’arrivée de la guerre 1939-1945. Cette suspension dura jusqu’en 1950.

Il faut attendre la grande loi du 11 février 1950 sur les conventions collectives pour voir la conciliation obligatoire et l’arbitrage facultatif. La loi du 13 novembre 1982 va essayer de revitaliser la médiation et va rendre la consultation facultative.

    1. La conciliation.

La procédure de conciliation tend au rapprochement des points de vue antagonistes jusqu’à l’acceptation d’une solution de type transactionnel, c’est-à-dire contractuel. Il s’agit en fait d’une simple négociation organisée. La loi de 1982 la rend facultative. Mais lorsqu’une convention collective la prévoit, elle devient alors obligatoire.

Tous les conflits collectifs de travail peuvent être soumis aux procédures de conciliation.

Les commissions de conciliation sont tripartites, c’est-à-dire, composées de représentants des employeurs, des représentants des salariés et des représentants des pouvoirs publics. Le procès-verbal de conciliation en cas d’aboutissement est obligatoire.

    1. La médiation.

C’est une procédure qui fait en principe suite à la conciliation, en cas d’échec de celui-ci. Elle n’est pas obligatoire dans son emploi. Elle se traduit au niveau de la procédure par l’intervention d’un tiers.

La procédure peut être déclenchée par l’accord des parties ou bien par la commission de conciliation ou bien encore le ministre du Travail sur sa propre initiative. Le médiateur est désigné sur une liste établie par le ministre du Travail.

Si le conflit est juridique, le médiateur peut demander aux parties de soumettre d’abord leur litige à un juge.

Si le conflit est économique, le médiateur, véritable conseiller en matière de relations individuelles, doit suggérer une solution tenant compte à la fois de la légitimité des revendications et des possibilités financières de l’entreprise.

Cette recommandation proposée aux parties n’a aucun caractère obligatoire. Les parties ont
8 jours pour l’accepter pour la refuser. S’il s’agit d’un rejet, celui-ci doit faire l’objet d’une motivation ; c’est une disposition en vigueur depuis la réforme du 13 novembre 1982. Si au contraire les parties acceptent la recommandation, le médiateur constate l’accord lequel a même valeur juridique qu’un accord collectif.

    1. L’arbitrage.

L’arbitrage est un particulier, juge d’occasion, choisi par les parties, qui dit le Droit et tranche ainsi un différent.

L’arbitrage est facultatif sauf qu’il est prévu par une convention collective. Depuis la loi de 1982, les conflits qui subsistent peuvent être mis à l’arbitrage. La loi prescrit que l’arbitre doit statuer un droit dans les litiges juridiques et en équité dans les litiges économiques.

La sentence arbitrale doit être motivée. Ses effets sont ceux d’une convention collective et les sanctions sont celles que la loi attache à la violation d’une convention collective. La sentence a force obligatoire. L’arbitrage, comme la médiation ou la conciliation, se dissout sans l’accord des partenaires sociaux.

Il existe une Cour supérieure d’arbitrage qui reçoit les recours, contre les arbitrages, pour excès de pouvoir ou pour violation de la loi.

Remarque : le Conseil des Prud’hommes n’est jamais compétent pour régler les conflits collectifs.




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