Lexique Médico-Juridique

 Le Livre d'Or
 

 
 
Acquisition de la Qualité de Commerçant
 
1.      Définition du commerçant
La qualité de commerçant ne s’acquiert pas par un acte formel ; selon l’article L121-1 du Code de Commerce «sont commerçants, ceux qui exercent les actes de commerce et en font leur profession habituelle»
1.1.            Le principe : l’exercice du commerce rend commerçant
La règle générale est que la répétition des actes de commerce rend commerçant même si cette activité commerciale n’est que secondaire.
Toutefois, la signature répétée de lettres de change ne rend pas commerçant.
Est un commerçant celui qui :
-          Accomplir des actes de commerce.

-          A titre professionnel est habituel.

-          En son nom et pour son compte personnel.
Quant aux sociétés, le problème est de savoir si les associés sont commerçants : ils sont commerçants s’ils sont tenus indéfiniment sur leur patrimoine personnel des dettes de la société (c’est le cas pour les associés d’une société en nom collectif ou en commandite simple), mais ils ne le sont pas lorsque les associés sont responsables à hauteur de leur apport (par exemples, les actionnaires d’une société anonyme ou les associés d’une société à responsabilité limitée).
 
1.2.            Les exceptions au principe

1.2.1.      Application de la théorie de l’accessoire.
C’est l’hypothèse où l’exercice du commerce est l’accessoire nécessaire d’une profession civile principale.
Deux formes peuvent se présenter :
-          L’agriculteur, qui, accessoirement, achète pour revendre pour les besoins de son agriculteur n’est pas commerçant.

-          La personne qui accomplit des actes de commerce mais sans spéculer ni sur le matériel ni sur le travail d’autrui ; par exemple, le chauffeur de taxi ou encore les manufacturiers qui travaillent la matière d’autrui sans spéculer sur le travail de leurs salariés (mécaniciens, plombiers, décorateurs, électriciens…) ne sont pas commerçant.

1.2.2.      Les personnes qui exercent le commerce pour le compte d’autrui

1.2.2.1.            Les mandataires sociaux
Ce sont notamment les gérants de SARL, le directeur général et les administrateurs de sociétés anonymes. Ils ne sont pas commerçants car ils ne sont pas tenus indéfiniment sur leur patrimoine personnel. Cependant, cette solution peut avoir des inconvénients dans le cas de commerçants qui n’utilisent la société que comme un paravent pour protéger leur patrimoine personnel notamment pour les créanciers. Aussi, l’article L 624-5 du Code du Commerce édicte que le tribunal peut prononcer, à tout moment de la procédure de redressement judiciaire ou liquidation judiciaire, la faillite personnelle de tout dirigeant d’une personne morale s’il a fait des actes de commerce dans son intérêt personnel sous le couvert de la société. On respecte donc à la fois la règle selon laquelle les mandataires sociaux ne sont pas commerçants et le paiement des créanciers.
1.2.2.2.            Les gérants de magasins
Il en existe 2 sortes :
-          Les gérants libres ou locataires gérants. Le gérant libre est locataire du fonds de commerce appartenant à autrui ; il assume les risques de son exploitation et est commerçant.

-          Les gérants salariés ou gérants succursalistes. Le gérant salarié est payé par un salaire ou un pourcentage sur le chiffre d’affaires ; il bénéficie des congés payés, de la sécurité sociale ; il ne devient pas propriétaire des marchandises et ne supporte pas les pertes. Il n’est donc pas commerçant et les litiges sont soumis au Conseil des Prud’Hommes.

1.2.2.3.            Les concessionnaires exclusifs.
Le concessionnaire exclusif supporte les risques et est commerçant mais sa liberté est limitée : il ne peut vendre qu’une marque et est soumis à une autorité très forte du concédant, bien qu’achetant pour revendre.
1.2.2.4.            Les représentants de commerce.

1.2.2.4.1.                  Le VRP (Voyageur Représentant Placier).
C’est le moins indépendant : il ne choisit pas son ou ses mandants et ne peut, sans leur accord, en chercher d’autres. Ce sont des salariés, mais ils doivent remplir certaines conditions fixées par l’article L 751-1 du Code du Travail :
-          Travailler pour le compte d’un ou plusieurs employés.

-          Exercer de façon exclusive et constante la profession de représentant.

-          Ne jamais faire d’opérations pour leur compte personnel.

-          Le contrat les liant à leur mandant doit déterminer leurs activités, les marchandises qu’ils vendent et la catégorie de clientèle qu’ils visitent.
S’ils perdent cette qualité, ils deviennent agents commerciaux.
1.2.2.4.2.                  L’agent commercial
C’est un représentant qui peut avoir de nouveaux mandants sans l’accord de ceux qu’il a déjà : il peut accomplir pour son compte personnel des opérations et peut recruter les VRP. La définition de l’agent commercial qu’énonçait le décret du 23 décembre 1958 a été confirmée par l’article 1er alinéa 1er de la loi du 25 juin 1991 relative aux rapports entre les agents commerciaux et leurs mandants : «l’agent commercial est un mandataire qui, à titre de profession indépendante, sans être lié par un contrat de louage de services, est chargé, de façon permanente, de négocier, et éventuellement, de conclure des contrats de vente, d’achat, de location ou de prestation de services, au nom et pour le compte de producteurs, d’industriels, de commerçants ou d’autres agents commerciaux. Il peut être une personne physique ou une personne morale».
Une seule variété est commerçante : les commissionnaires. Leur différence avec l’agent commercial est qu’ils ne révèlent pas le nom de leur mandant. Par conséquent, ici la dépendance économique est prise en considération par le droit pour décider de la qualité de commerçant : en effet, au sens large, tous les représentants de commerce font de la commission.
 
2.      La liberté du commerce.
La révolution a posé le principe du commerce et a consacré l’importance de la loi par rapport aux corporations de l’Ancien Régime. Il fallait auparavant un agrément de la corporation et l’accomplissement d’un chef d’œuvre. Désormais, à la place de l’examen d’entrée, il y aurait une sorte de sélection naturelle. Mais ce principe ne signifie pas la liberté de toute vente : il existe 2 séries de sélections :
-          Des interdictions fondées sur la considération de la personne.

-          Des limites tenant à la profession exercée.

2.1.            Les interdictions et limitations fondées sur la considération de la personne.

2.1.1.      Certains délinquants

2.1.1.1.            La loi n°47-1635 du 30 août 1947
Elle est dite «d’assainissement des professions commerciales et industrielles» (sous l’article L 126-1 du Code de Commerce). Dans son article 1er, elle énumère les condamnations qui entrainent la déchéance.
-          Les crimes : toute condamnation pour n’importe quel crime, entraine la déchéance du droit d’exercer le commerce.

-          Les délits : il faut que la condamnation effective ait été d’au moins 3 mois d’emprisonnement sans sursis. Tous les délits n’entrainent pas déchéance : la déchéance résulte des délits d’honnêteté (vol, escroquerie, abus de confiance, recel, faux, contrefaçon), des délits de mœurs (attentat aux mœurs, outrage public à la pudeur), des délits fiscaux et économiques (violation de la réglementation des prix).

-          La destitution judiciaire des officiers ministériels, des notaires, des greffiers.

2.1.1.1.1.                  Portée de la déchéance
Cette portée est plus large que l’interdiction d’exercer le commerce ; la déchéance entraine non seulement l’interdiction d’exercer leur commerce mais aussi de faire d’autres actes qui ne rendent pas commerçants :
-          Etre mandataire d’une société.

-          Donner en location-gérance son fonds de commerce.

-          Etre agent commercial.

2.1.1.1.2.                  Déclenchement de la déchéance et durée
La déchéance est automatique même si le tribunal ne l’a pas prononcée et est perpétuelle sauf si le tribunal en décide autrement.
Cependant, le tribunal peut, en condamnant le délinquant, relever le condamné de la déchéance, soit dans le jugement de condamnation, soit au plus tard à la demande du condamné. Cette demande n’est soumise à aucune condition de délai ; le tribunal est libred’accorder ou de refuser ce relevé (procédure précisée par l’article 703 du Code de Procédure Pénale).
2.1.1.1.3.                  Sanction de la violation de la déchéance.
Le condamné encourt un emprisonnement de 2 ans et/ou une amende de 375 000 euros. En cas de récidive, il encourt la confiscation de son fonds de commerce et un emprisonnement de 5 ans (article 6 de la loi du 30 août 1947).
2.1.1.2.            Les délits en matière fiscale (article 1750 du Code Général des Impôts (CGI)).
Pour les délits en matière d’impôts directs, de taxe sur la valeur ajoutée ou autres taxes sur le chiffre d’affaires, de droit d’enregistrement, de taxe de publicité foncière et de droit de timbre, le tribunal peut, à titre de peine complémentaire, interdire temporairement au condamné d’exercer directement ou par personne interposée, pour son compte ou le compte d’autrui, toute profession industrielle, commerciale ou libérale. La durée de l’interdiction ne peut excéder 3 ans (cette durée peut être doublée en cas de récidive).
2.1.2.      Les incompatibilités
Certaines personnes ne pourront être commerçantes du fait de leur profession ; ce sont les fonctionnaires et les officiers ministériels. On donne traditionnellement trois justifications à ce principe : la crainte d’un trafic d’influence, le dévouement total que les fonctionnaires doivent avoir pour le service de l’Etat, enfin, la dignité dont doit être revêtu le fonctionnaire ou l’officier public.
Certaines professions libérales comme les avocats, les experts comptables, les architectes ne peuvent pas être commerçants.
Si l’incompatibilité n’est pas respectée, il n’y a pas nullité des actes de commerce accomplis.
2.1.3.      La situation du commerçant étranger
Un décret-loi du 17 juin 1938 a établi la règle de la réciprocité : on ne permet pas à un étranger de s’établir commerçant en France si les français ne sont pas autorisés à le faire dans son pays d’origine.
Par ailleurs, tout étranger qui souhaite exercer une activité commerciale sur le territoire français doit avoir obtenu au préalable une carte d’identité de commerçant étranger délivrée par le préfet du département dans le ressort duquel, il souhaite exercer son activité. Ne sont pas soumis à l’obtention de cette carte :
-          Les ressortissants des Etats de l’Union Européenne.

-          Les étrangers qui peuvent se prévaloir d’une convention qui les en dispense.

-          Les étrangers titulaires de la carte de résident.
Le commerçant étranger est privé de certains droits notamment la section III relative au renouvellement d’un bail commercial ne peut pas être invoquée par un commerçant étranger à moins que pendant les guerres de 1914 et de 1939, il n’ait combattu dans les armées françaises ou alliées ou qu’il n’ait des enfants ayant la qualité de français. Les ressortissants de l’Union Européenne ne sont pas concernés par cette restriction.
2.1.4.      Les associations
Elles sont régies par la loi du 1er juillet 1901 et, par définition, une association est une «convention par laquelle 2 ou plusieurs personnes décident de mettre en commun leurs connaissances ou leur activité dans un but autre que partager les bénéfices».
Cependant, si les membres ne peuvent s’enrichir, l’association peut-elle s’enrichir, mais elle ne jouit pas de la liberté du commerce puisqu’elle est à but non lucratif. En cas de non-respect de ces règles, il existe une sanction jurisprudentielle en vertu de laquelle l’association est considérée comme une société de personnes, c’est-à-dire que ses créanciers peuvent poursuivre les sociétaires sur leur patrimoine personnel indéfiniment et solidairement.
Cependant, même si elle ne fait pas de commerce, une association peut être mise en redressement ou liquidation judiciaire. D’autre part, les associations peuvent faire du commerce si c’est de manière accessoire et pour les besoins de leur activité.
 
2.2.            Les professions commerciales dont l’accès est interdit ou subordonné à une autorisation ou à un examen.

2.2.1.      Les commerces interdits.
Ce sont tous les commerces portant sur des marchandises dont les vente est interdite (par exemple la vente de matériel pornographique) et les commerces érigés en monopole (tabacs et allumettes, armes de guerre).
2.2.2.      Les commerces soumis à une autorisation ou à un examen préalable
Les pharmacies, les débits de boissons, les abattoirs, les laboratoires d’analyses médicales, les agences de voyage sont soumis à une autorisation administrative et on demande l’obtention d’un diplôme particulier.
 
3.      La capacité requise pour exercer le commerce

3.1.            Les mineurs.
Depuis la loi du 5 juillet 1974 sont mineures les personnes n’ayant pas 18 ans accomplis. Le mineur ne peut pas exercer le commerce, même s’il est émancipé.
3.2.            Les incapables majeurs

3.2.1.      Les majeurs en tutelle
Ils sont unis au régime des mineurs en tutelle et les actes de commerce sont hors de leur portée, même s’ils sont accomplis par le tuteur. Cependant, le décret du 23 mars 1967 sur le registre du commerce apporte une dérogation indirecte : le jugement qui prononce la tutelle doit être publié au registre du commerce pour être opposable au tiers.
3.2.2.      Les majeurs en curatelle
Le majeur en curatelle doit avoir l’autorisation de son curateur pour effectuer tout acte de commerce ; faute de cette assistance, les actes seraient nuls (article 510-1 du Code Civil).
3.2.3.      La sauvegarde de justice.
Si l’on soupçonne une personne de faiblesse mentale, tout intéressé peut se munir d’un certificat médical et procéder à l’inscription sur un registre spécial tenu par le Procureur de la République, même à l’insu de la personne. L’effet de cette inscription est que, pendant un certain délai, tous les actes accomplis peuvent être rescindés s’ils sont lésionnaires, sans distinction entre les actes (article 491-2 du Code Civil). La sauvegarde de justice n’empêche donc pas de faire le commerce mais, si elle devient connue, elle peut ruiner le crédit du candidat commerçant.
 
3.3.            La femme mariée.

3.3.1.      Exercice par la femme d’un commerce distinct.
Depuis la loi du 23 décembre 1985, l’article 223 du Code Civil indique que chaque époux peut librement exercer une profession.
La loi du 10 juillet 1982 dispose que «le conjoint d’un commerçant n’est réputé lui-même commerçant que s’il exerce une activité commerciale séparée de celle de son époux» (article L 121-3 du Code du Commerce). Il faut donc que le conjoint fasse des actes de commerce de façon indépendante et habituelle pour avoir la qualité de commerçant.
Dans un régime communautaire, l’article 1413 du Code Civil admet que le paiement des dettes contractées par un époux, pour les besoins de son commerce, peut être poursuivi non seulement sur ses biens propres mais aussi sur les biens communs.
Dans un régime séparatiste, chaque époux n’engage que les biens qui lui appartiennent.
3.3.2.      Exercice d’un commerce en commun par les 2 époux.
La plupart des conjoints des commerçants sont dépourvus de statut. Plusieurs situations peuvent se présenter dans la pratique :
-          La femme reste l’auxiliaire du mari et n’est pas considérée comme commerçante. Seul le mari a la qualité de commerçant et exerce à titre principal le commerce.

-          La femme possède un fonds de commerce, elle est commerçante. Cependant, si le mari s’immisce dans le commerce de sa femme, il est réputé cautionner ses actes en vertu de la théorie de l’apparence.
La loi du 10 juillet 1982 est venue promouvoir la situation du conjoint d’un commerçant ou d’un artisan. Elle vise 3 situations (article L 121-4 du Code de Commerce) :
-          Le conjoint salarié.

-          Le conjoint collaborateur.

-          Le conjoint associé.
Mais la législation n’oblige pas le conjoint du commerçant à revêtir l’une ou l’autre de ces qualifications.
3.3.2.1.            Le conjoint salarié
L’article 243 du Code de la Sécurité Sociale exige que le conjoint participe effectivement à l’entreprise à titre professionnel et constatant (cela exclut l’aide occasionnelle) et d’autre part, il importe qu’une rémunération normale soit allouée.
Avantage de ce statut : le conjoint salarié bénéficie des avantages sociaux applicables à tout salarié (exemple : il aura droit à des indemnités journalières en cas de maladie, en cas de maternité ou d’accident du travail).
3.3.2.2.            Le conjoint collaborateur.
Pour obtenir ce statut, le conjoint doit :
-          Participer effectivement et habituellement à l’activité de l’entreprise.

-          Ne pas être rémunéré pour son travail.

-          Ne pas exercer une autre activité professionnelle.
La qualité de collaborateur doit être mentionnée au registre du commerce et des sociétés. Cette qualité lui fait bénéficier de droits spécifiques dans la gestion de l’exploitation commerciale. Le collaborateur est réputé avoir reçu mandat de chef d’entreprise, d’accomplir au nom de ce dernier les actes d’administration concernant les besoins de l’entreprise (article L 121-6 du Code du Commerce). Dans la conception extensive, les achats et les ventes de marchandises pour les besoins de l’entreprise sont des actes d’administration.
Le mandat peut être révoqué, à l’initiative de l’un ou de l’autre des époux qui fait une déclaration devant le notaire. Cette dernière n’a d’effet à l’égard des tiers que 3 mois après sa mention au Registre de Commerce et des sociétés ; en l’absence de cette mention, elle est tout de même opposable aux tiers si ceux-ci en ont eu connaissance.
Avantages de ce statut : l’épouse conjoint collaborateur bénéficie en cas de maternité d’une allocation forfaitaire de repos maternel. Pour la retraite, ce statut permet au conjoint collaborateur d’acquérir une retraite personnelle.
3.3.2.3.            Le conjoint associé
Deux époux peuvent être, seuls ou avec d’autres personnes, associés dans une même société.
L’obtention de ce statut est possible quel que soit le régime matrimonial du conjoint associé, et quels que soient les apports (apports en numéraire, en nature ou en industrie (travail)).
Avantages de ce statut :
-          En cas de décès du chef d’entreprise, le conjoint associé peut demeurer dans la société.

-          En cas de défaillance de l’entreprise, le conjoint associé n’est responsable des pertes qu’à concurrence de son apport dans la société.



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